La surveillance vidéo est accessible aux victimes
« Quelles démarches faut-il faire pour avoir accès aux images de vidéosurveillance d’un restaurant et de l’espace public proche ? Le suspect du vol dont nous avons été victimes y apparaît certainement. Nous sommes tellement surveillés que quand on a besoin d’identifier un escroc cela doit être possible pour le citoyen ! »
La surveillance de la voie publique (rue, route, place publique…) ou d’un lieu ouvert au public tel un restaurant (ou une gare, une mairie …) peut être autorisée pour un certain nombre de raisons telles que la prévention des attentes à la sécurité des personnes et des biens (vols, agressions, …), la protection des bâtiments et installations publics et leurs abords, la protection des abords immédiats des commerces dans les endroits particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol, etc… (art. L. 251-2 du Code de la sécurité intérieure).
Le propriétaire du restaurant que vous avez fréquenté a donc pu effectivement installer un système de vidéoprotection, après information du Maire de la commune et l’autorisation de la Préfecture.
Ce système de vidéoprotection a pu être installé dans le restaurant lui-même, ainsi que sur la voie publique aux abords immédiats du restaurant.
Attention : le commerçant n’est pas autorisé à installer un tel système afin de filmer la voie publique elle-même. Seuls les abords immédiats, tels que la façade du restaurant et la porte de sortie, peuvent être filmés.
La législation française est très claire : toute personne intéressée peut demander à consulter les enregistrements la concernant.
En effet, l’article 39 de la loi « Informatique et libertés » relatif à la protection des données personnelles, dans sa version en vigueur du 25 mai 2018, prévoit expressément que : « Toute personne physique justifiant de son identité a le droit d’interroger le responsable d’un traitement de donné à caractère personnel en vue d’obtenir la communication, sous forme accessible, des données à caractère personnel qui la concernent ainsi que de toute information disponible quant à l’origine de celles-ci »
Votre demande d’accès doit être adressée au responsable du système de vidéoprotection. La première étape est donc de procéder à l’identification du propriétaire/responsable des caméras qui ont filmé la scène en question et de contacter son service de sécurité.
Cette identification ne devrait pas poser difficulté. En effet, la loi impose à tout commerçant qui met en place un système de vidéosurveillance d’en informer sa clientèle au moyen de panneaux affichés de manière visible et indiquant :
- L’existence du dispositif ;
- Le nom du responsable du dispositif ;
- La base légale de celui-ci (généralement, en ce qui concerne les commerces, il s’agira de l’intérêt légitime du commerçant de sécuriser ses locaux) ;
- La durée de conservation des images (qui ne peut être supérieure à un mois) ;
- Les modalités concrètes d’exercice par les clients de leur droit d’accès aux enregistrements visuels les concernant ;
Une fois que vous avez été en mesure d’identifier le responsable des caméras, vous pouvez lui adresser votre demande d’accès aux images de vidéosurveillance par courrier (ou email), en précisant la raison de cette requête.
Le responsable de la vidéo surveillance peut s’opposer à votre demande s’il l’estime abusive, étant précisé que ce caractère abusif devra alors être établi par le responsable qui devra démontrer que cette demande a été effectuée de manière répétitive et injustifiée.
Enfin, l’accès peut également vous être refusé pour les motifs suivants : sûreté de l’état, défense, sécurité publique, instruction judiciaire en cours, ou protection de la vie privée d’autres personnes. Ces derniers motifs concernent plus généralement l’accès aux enregistrements de vidéosurveillance sur les voies publiques.
Si une demande de consultation est demandée et refusée, un recours peut être engagé auprès de la commission départementale des systèmes de vidéosurveillance, qui peut être saisie par toute personne rencontrant une difficulté dans le fonctionnement d’un système de vidéoprotection.
Il est également possible de saisir un tribunal administratif ou judiciaire, dans le cadre d’une procédure d’urgence si nécessaire.
Attention : ces démarches doivent être effectuées dans un délai d’un mois qui suit l’enregistrement du passage dans le lieu, car la loi interdit la conservation des images au-delà de ce délai, sauf si une procédure judiciaire est en cours.
En règle générale, ce délai est suffisant pour effectuer les vérifications nécessaires en cas d’incident et, éventuellement, pour enclencher d’éventuelles procédures pénales. Si de telles procédures sont engagées, les images sont alors extraites du dispositif et conservées pour la durée de la procédure.
Concrètement, la première démarche à effectuer lorsque vous êtes victime d’une infraction est d’aller déposer plainte et d’indiquer la présence de caméra de vidéosurveillance à l’endroit où vous avez été victime : cela permet non seulement d’éviter la destruction des images à l’expiration du délai d’un mois, mais surtout cela permet l’exploitation des images en question d’une manière « efficace ». En effet, en application de l’adage « nul n’est censé se faire justice soi-même », l’identification par vos soins de l’auteur de l’infraction dont vous avez été victime perdra tout son intérêt si aucune procédure pénale n’est engagée en parallèle.
Maître Caroline JAMET
Avocat au Barreau de Tours