« Je désire vendre un studio avec une mezzanine, situé au deuxième et dernier étage. Située sous les combles, elle fait environ 1m80 de hauteur et 12m² de surface.
Elle apparaissait déjà sur mon acte d’acquisition de 2000.
Je n’ai aucune pièce justifiant des demandes d’autorisation préalables par le précédent propriétaire vers la copropriété. Pour moi, il s’agit d’un aménagement intérieur, reposant sur des parties communes (plancher et sous-toit).
Y a-t-il un délai de prescription, ou un texte de loi, pouvant m’éviter une demande de régularisation auprès de la copropriété et un acte de rachat devant notaire afin de vendre mon bien ? »
Vous envisagez de vendre un studio comportant une mezzanine d’environ 12 m², installée sous les combles au dernier étage de l’immeuble. Cette mezzanine figurait déjà dans votre acte d’acquisition datant de 2000.
Vous ne disposez toutefois d’aucun justificatif relatif à une autorisation préalable donnée par la copropriété, ni d’un acte notarié constatant une cession éventuelle de parties communes.
1. Sur le régime juridique applicable
La régularité juridique de cet aménagement dépend de sa nature et de son impact sur les parties communes.
Deux situations doivent être distinguées :
- En cas d’empiètement sur des parties communes (notamment combles ou plancher), il peut s’agir d’une appropriation irrégulière.
Or, sauf stipulation contraire dans le règlement de copropriété ou l’état descriptif de division, ces éléments relèvent en principe des parties communes (article 3 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis).
À cet égard, la jurisprudence raisonne classiquement par référence au point d’accès. Voir pour un exemple récent : « il est de jurisprudence constante que si les combles sont accessibles à partir des parties communes, ces combles sont communs, si ils sont accessibles exclusivement à partir des parties privatives ils sont privatifs sauf si ils comportent des équipements communs et présentent une utilité pour la copropriété concernant l’accès à la toiture. » CA Aix-en-Provence, ch. 1 8, 14 févr. 2024, n° 22/10134.
Une telle appropriation suppose en principe une autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires, puis un acte notarié constatant la cession de la partie commune.
À défaut, l’action en remise en état engagée par le syndicat des copropriétaires est soumise à la prescription trentenaire (article 2227 du Code civil), à la condition que l’occupation ait été paisible, continue, publique, non équivoque et à titre de propriétaire.
- En l’absence d’appropriation, si les travaux se limitent à un aménagement intérieur sans modification des parties communes, seule la conformité aux règles de la copropriété (autorisation éventuelle, respect de l’harmonie, absence d’atteinte à la structure) est en jeu.
Dans ce cas, l’action du syndicat est soumise au délai de prescription de droit commun, soit cinq ans à compter du jour où il a eu connaissance des travaux (article 42 de la loi de 1965 précité, combiné avec l’article 2224 du Code civil).
En pratique, dès lors que la mezzanine repose sur des éléments structuraux (plancher, charpente), une analyse technique précise est requise pour déterminer si les limites privatives ont été dépassées.
2. Sur les recommandations pratiques
En cas de doute, il est fortement recommandé de :
- analyser les documents de la copropriété (règlement, état descriptif de division) pour vérifier le statut des combles.
- faire constater par un professionnel compétent (architecte, bureau d’études) la conformité technique et structurelle des travaux réalisés
- consulter le syndic ou faire voter, si nécessaire, une régularisation en assemblée, si nécessaire
- Produire ces éléments au notaire afin de sécuriser l’acte de vente.
Ce travail préventif permettra d’éviter toute difficulté postérieure, notamment une action en remise en état du syndicat ou un recours de l’acquéreur fondé sur un vice caché ou un manquement au devoir d’information.
A défaut, il faudra faire preuve de transparence vis-à-vis de l’acquéreur afin en pleine connaissance de cause, de supporter les risques juridiques liés à une situation non régularisée.
Maître Nicolas FORTAT, avocat au Barreau de Tours.