Chaque nuit, je suis réveillée par un scooter qui passe devant ma chambre à 4h00. Je sais que c’est un homme qui part à son travail. Je suis allée le voir à son travail pour lui suggérer de changer d’itinéraire (même longueur, sans voisinage). Il refuse.
A la gendarmerie, ils prennent note, et c’est tout. Que puis-je faire d’autre ? Lancer une procédure ? Comment ?
Vous vous interrogez sur les recours qui vous sont offerts dans une situation où vous êtes réveillé chaque nuit, à 4 heures du matin, par un votre voisin qui passe en scooter devant votre domicile pour se rendre à son travail, et alors qu’il aurait possibilité de changer d’itinéraire sans déranger le voisinage.
Les nuisances sonores liées à l’utilisation d’un deux-roues sont un problème récurrent qui participe à la pollution sonore et nuit à la qualité de vie des riverains.
Elles sont définies à l’article R1336-5 du Code de la Santé Publique qui dispose : « aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme, dans un lieu public ou privé, qu’une personne en soit elle-même à l’origine ou que ce soit par l’intermédiaire d’une personne, d’une chose dont elle a la garde ou d’un animal placé sous sa responsabilité. »
Les nuisances sonores sont donc caractérisées par un bruit particulier qui, par sa durée, sa répétition ou son intensité, trouble votre tranquillité ou votre santé.
Une fois les tentatives de résolution amiable auprès de l’auteur des nuisances épuisées (notamment, discussion directe, lettre recommandée valant mise en demeure de cesser les nuisances, tentative de conciliation auprès d’un conciliateur de justice), vous pouvez envisager de porter à la connaissance de votre Maire les nuisances sonores dont vous êtes victime, leurs horaires et leur impact sur votre santé.
En effet, chaque Maire dispose de pouvoir de police afin de protéger la tranquillité publique ainsi que prévu à l’article L2212-2, 2°, du Code Général des Collectivités, et notamment « le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d’ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d’assemblée publique, les attroupements, les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ».
Le Maire peut aussi par des arrêtés municipaux limiter les activités bruyantes et, par la suite, dresser un procès-verbal contraventionnel pour tapage nocturne (amende de troisième classe).
La police municipale joue donc un rôle dans la constatation des infractions, à l’instar des services de police ou de gendarmerie auprès desquels il est également possible de déposer plainte.
Au-delà de la nuisance sonore passible de sanction, la police municipale peut aussi contrôler les équipements pour s’assurer notamment, s’agissant d’un scooter, qu’il ne dépasse pas les limites maximales d’émission sonore en décibels prévues par la législation et sa conformité.
Pour autant, les actions des mairies peuvent parfois rester limitées en raison d’un manque de ressources humaines (effectifs insuffisants) ou d’un manque de moyens matériels (des sonomètres homologués ont un coût important, nécessitent souvent de prolonger les mesures acoustiques sur plusieurs heures et sont difficiles à interpréter).
Une autre voie possible est la saisine du Tribunal judiciaire pour faire sanctionner un trouble anormal de voisinage, tel que prévu à l’article 1253 du Code civil, qui sera apprécié en fonction de son intensité, de sa durée, de sa répétition et du contexte local (zone urbaine, zone rurale, zone de travail ou résidentielle).
Pour caractériser l’existence de troubles anormaux du voisinage, il vous faudra préalablement recueillir des preuves telles que : attestations circonstanciées de témoins, pétitions de voisins, interventions de la police municipale, plainte, main-courante, éléments médicaux sur l’impact des nuisances sur la santé ou constat d’huissier.
Il sera peut-être nécessaire d’aller plus loin et de solliciter l’organisation préalable d’une expertise judiciaire (sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile) devant la juridiction des référés du Tribunal judiciaire, pour réaliser notamment des mesures acoustiques et vérifier notamment si les dispositions du Code de la Santé Publique encadrant les nuisances sonores sont respectées
Les conclusions de l’expert judiciaire permettront alors de solliciter du Tribunal judiciaire que soit ordonnée la cessation des nuisances et éventuellement la condamnation du responsable à payer des dommages et intérêts afin de réparer les préjudices subis.
Maître Laurence RIBAUT, avocat au Barreau de Tours.