Un lecteur, verbalisé pour absence de ceinture de sécurité sur un parking privé, peut contester la contravention, en suivant les conseils juridiques détaillés ici.

« Je me trouvais sur le parking de l’Esat où je travaille, et ai été verbalisé pour non-port de la ceinture de sécurité. J’estime qu’une absence de ceinture de sécurité sur un terrain privé ne peut être caractérisée en infraction.

Je l’ai bouclée avant de m’engager sur la voie publique. Ma requête en exonération a été refusée, sur la base de l’article 537 du code de procédure pénale, qui indique que “  les contraventions sont prouvées par procès-verbaux ”. Comment puis-je contester cette infraction ? »

L’article 529-2 du Code de la Route stipule que, dans le délai de quarante-cinq jours suivant la remise d’un avis de contravention, le contrevenant peut formuler une requête tendant à son exonération auprès du service indiqué dans l’avis de contravention. Cette requête est transmise au ministère public.

Selon l’article 530-1 du même code, l’officier du ministère public ne dispose alors que de trois options :

  • renoncer à l’exercice des poursuites,
  • saisir le tribunal de police,
  • aviser l’intéressé de l’irrecevabilité de la réclamation non motivée ou non accompagnée de l’avis de contravention.

Dans notre cas, l’officier du ministère public n’a pas décidé de renoncer aux poursuites à réception de la requête en exonération.

Il n’a pas non plus saisi le tribunal de police : il a rejeté la requête en évoquant l’article 537 du Code de Procédure Pénale.

Pourtant, l’article 530-1 ne prévoit que deux motifs d’irrecevabilité : l’absence de motivation de la réclamation, et le défaut de production de l’avis de contravention lors de l’envoi de la réclamation.

En principe, l’officier du ministère public ne peut rejeter une requête en exonération pour un motif autre que ceux prévus à l’article 530-1.

Une circulaire du ministère de la Justice du 7 avril 2006 le rappelle expressément. Elle indique que, « en application de l’article 530-1 du C.P.P. une contestation ne peut être considérée comme étant irrecevable que si elle n’est pas motivée ou si elle n’est pas accompagnée de l’avis correspondant à l’amende, outre les cas où, en application des dispositions de l’article 529-10, elle doit être accompagnée du versement d’une consignation.

L’O.M.P. ne dispose pas du pouvoir d’apprécier le caractère bien-fondé ou non de la réclamation ou de la requête en exonération, son pouvoir d’appréciation se limitant à l’examen de la recevabilité formelle de la contestation.

Lorsque les conditions de recevabilité sont remplies, la contestation doit être obligatoirement portée devant la juridiction de jugement à moins que l’O.M.P ne décide de renoncer aux poursuites ». (Circulaire CRIM 2006 – 08 E1/07-04-2006 NOR : JUSD0630049C).

Ce principe n’a pas été respecté au cas de notre contrevenant, dont la requête en exonération aurait été rejetée au seul motif que les contraventions sont prouvées par procès-verbaux.

Le texte de l’article 537 du Code de Procédure Pénale n’est d’ailleurs pas cité intégralement, puisque cette disposition précise que « sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux (…) font foi jusqu’à preuve contraire.

La preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins ».

Cette preuve contraire peut donc être rapportée.

L’auteur de la requête en exonération rejetée pour une raison autre que celles prévues à l’article 530-1 du Code de la route peut encore contester ce rejet devant le tribunal de police.

Il peut pour cela saisir cette juridiction par voie de requête pour contester l’avis d’amende émis par le Trésor Public.

La Cour de Cassation a en effet jugé que « selon l’article 530-2 du Code de procédure pénale, donne lieu à incident contentieux relatif à l’exécution du titre exécutoire la décision de l’officier du ministère public de déclarer irrecevable la réclamation formée par le contrevenant pour un motif autre que ceux prévus par l’article 530-1, alinéa 1, du même Code ». (Criminelle, 29 octobre 1997, n° de pourvoi 97-81.904)

Cette solution est applicable aux requêtes en exonération déclarées irrecevables pour un motif autre que ceux prévus par l’article 529-2 du Code de Procédure Pénale.

Notre employé de l’ESAT devra adresser sa contestation motivée par lettre recommandée avec accusé de réception au tribunal de police, en s’appuyant sur les articles 529-2, 530-2 et 711 du Code de Procédure Pénale.

La recevabilité formelle de cette requête ne permet toutefois pas de préjuger des chances de la voir aboutir favorablement.

En effet, l’employé de l’ESAT estime qu’il ne pouvait être verbalisé pour non-port de la ceinture de sécurité parce qu’il se trouvait sur un terrain privé, et qu’il avait attaché sa ceinture avant de s’engager sur la voie publique.

C’est à cet égard que la motivation de la décision de rejet de l’officier du ministère public peut prendre toute sa pertinence : il appartient au contestant de prouver l’inexactitude des mentions figurant au procès-verbal de constat de l’infraction, autrement que par de simples déclarations.

Il lui faudra donc prouver en premier lieu que sa ceinture de sécurité était attachée au moment où, selon lui, il s’est engagé sur la voie publique.

Il devra également établir, en second lieu, que le parking de l’ESAT n’est pas « une voie ouverte à la circulation publique » au sens de l’article R. 110-1 du Code de la Route, même s’il s’agit d’un terrain privé.

Ainsi, dans un arrêt du 11 juin 2013, la Cour de Cassation a considéré qu’un défaut de port de ceinture de sécurité ne constituait pas une infraction pénale parce que ce défaut a été relevé « sur le parking (d’une) résidence (…) et que l’accès à cette propriété est délimité par trois murets de pierre, dont l’un supporte un panneau « Propriété privée – Entrée interdite » ; que le juge en conclut que le parking en cause, réservé à la desserte des occupants de la résidence, à l’exception de toutes autres personnes, doit être considéré comme une voie privée non ouverte à la circulation publique ». (Criminelle, 11 juin 2013, n° de pourvoi 12-83.599)

La Cour de Cassation rappelle à cette occasion que « sauf les exceptions qu’elles prévoient, les dispositions de l’article R 110-1 du code de la route ne régissent que l’usage des voies ouvertes à la circulation publique ».

Ce qu’est peut-être le parking d’un ESAT…

Roger MABOUANA, Avocat au Barreau de Tours